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vive le côté obscur de la force


C'était l'été, Adrian devait avoir environ dix sept ans. Leur famille était exceptionnellement réunie autour d'un repas. Cependant, l'ambiance n'était pas vraiment au rendez-vous. Seuls les bruits des fourchettes claquant contre le bord de leurs assiettes en porcelaine se faisait entendre. Personne n'était vraiment décidé à parler. Son père se lança le premier. Bien évidemment, il s'adressa à Sebastian. Tout le monde s'adressait toujours à Sebastian. Agé de vingt-cinq ans, Sebastian était l'aîné de la famille. Le modèle à suivre. Brillant avocat, il avait reprit l'affaire de la famille et l'avait faite fructifier en à peine un an. Certains avaient un don pour les affaires, d'autres n'en avaient aucun. Sebastian faisait partie de la première catégorie de personnes. L'empire financier de la famille Dezrodnov s'évaluait déjà à plusieurs milliards mais Sebastian avait évidemment trouvé le moyen de faire mieux. Adrian écouta la conversation tout en prenant bien soin de ne pas lever le nez de son assiette. Lui, en comparaison était le mouton noir de la famille. Sans but, sans perspective d'avenir, il se droguait depuis un an. Tout le monde le savait mais, pourtant, c'était un sujet tabou dont personne ne voulait parler. Ne pas en parler équivalait, pour eux, à faire comme si ce problème n'existait pas. Adrian, lui, ne demandait pas mieux. Ses parents lui fichaient la paix et c'était tout ce qu'il demandait. L'espace d'une seconde, il leva la tête et croisa le regard de sa jeune soeur. Cette dernière lui sourit. C'était la seule personne qu'il appréciait vraiment. Il esquissa également un sourire et, ensuite, continua à manger. La soirée se termina dans la même ambiance qu'elle avait débuté. Lorsque leur oncle arriva, Adrian profita de l'occasion pour monter dans sa chambre. De toute manière, il était complètement transparent alors à quoi bon rester ? A peine arrivé, il se roula un joint qu'il commença à fumer à travers la fenêtre de sa chambre. Au moins, avec ça, il dormirait comme un bébé.

Mais, la nuit fut très agitée. Aux alentours de trois heures du matin, Adrian fut réveillé par un bruit horrible. Même si son esprit était encore embrumé à cause de la drogue, il se raidit et s'assit dès son réveil. Quelque chose clochait. Prudemment, il se leva. Alors qu'il s'apprêtait à poser sa main sur la clinche, il fut devancé. Deux hommes masqués firent irruption dans sa chambre. Sans même attendre une seule seconde, l'un des deux hommes lui tira une balle droit dans le coeur. Et, comme si de rien était, ils ressortirent de sa chambre comme ils étaient venus laissant Adrian pour mort. Sous le choc de la balle, l'adolescent s'était écroulé. La tête contre la moquette, il avait le souffle coupé. Aucune douleur. Ainsi la mort était-elle vraiment comme on le racontait, douce et indolore ? Cinq minutes passèrent et, pourtant, Adrian était toujours bel et bien vivant. Peu à peu, il se rendit compte qu'il n'allait pas mourir. Pas aujourd'hui. Il passa sa main sur son t-shirt à l'endroit exact où la balle l'avait touché. C'est alors qu'il sentit un collier. Le collier orné d'une plaquette militaire que Sebastian lui avait donné avant le souper. Il l'avait mise pour ne pas contrarier son frère et avait complètement oublié de la retirer. Il regarda alors le collier de plus près. Le métal était renfoncé à l'endroit où la balle l'avait touché mais sa peau, elle, était à peine bleutée. Réalisant la chance qu'il avait de vivre, il se leva. Combien de chances y avaient-ils pour que cela se produise ? Il était véritablement un miraculé. Il resta complètement immobile jusqu'à ce qu'il entende un autre coup de feu. Vu la distance, ce devait être soit son père soit sa mère. Adrian reprit ses esprits et se dirigea immédiatement vers la chambre de sa jeune soeur. Elle était tremblante mais bien réveillée. Lorsqu'elle le reconnut, elle courut vers lui. Un autre coup de feu. Cette fois, ses parents étaient morts tous les deux. Il ne restait plus beaucoup de temps. Il devait prévenir Sebastian. Sa petite soeur derrière lui, il entra dans la chambre de son aîné. Il dormait. « Sebastian. Réveille toi » Maugréant dans son sommeil, l'avocat finit par se réveiller. Trop tard, les hommes approchaient de sa chambre. Voulant sauver sa soeur, il lui ordonna de se cacher en dessous du lit et, par instinct de survie, il la rejoignit. Les deux hommes entrèrent dans la chambre et, sans aucune émotion tuèrent son frère qui s'écrasa sur le sol, le regard vide, la tête tournée vers Adrian. Même si sa soeur avait envie de crier, il lui plaqua sa main contre les lèvres. Si elle soufflait un peu trop fort, elle allait signer leur arrêt de mort. « Le compte est bon. Les parents et les deux frères. C'est l'APO qui va être content. Travail propre et net. J'aurais bien voulu ajouter la gamine pour avoir un strike mais, apparemment, ils veulent pas la tuer. Dommage » déclara l'un des deux hommes en espagnol. Ensuite, ils sortirent et Adrian ne les revit plus jamais.

L'enterrement eut lieu quelques jours plus tard. Toutefois, Adrian n'y assista pas. Etant donné que ces hommes le croyaient mort, il devait absolument le rester. A contre-coeur, il dit donc au revoir à sa petite soeur en lui promettant de venir la rechercher dès qu'il le pourrait. Un ami de la famille - policier - arrangea le coup et, dans la presse, on mentionna bien quatre corps. Il changea de nom et prit celui de Dezrodnov. Pourquoi ? C'était un nom assez répandu qui, en plus, était celui d'un ancêtre de leur famille. Apparemment, ce type avait contribué à dilapider une partie de leur fortune à l'époque des tsars. Une sorte de mouton noir en somme. Complètement déconnecté de la réalité, Adrian ne fit pas d'études et emménagea en France. Il se contenta de prendre un petit appartement avec les quelques économies qu'il avait emporté. Pour vivre, il commença à faire du trafic de drogues. Etant donné que, lui-même était consommateur, ça lui allait plutôt bien. Toutefois, la mort de sa famille l'avait anéanti. Même si, en apparence, il détestait son frère, au fond, il l'avait toujours admiré. Et, malheureusement, son frère était mort en se croyant détesté. Plus jamais il n'aurait l'occasion de lui dire qu'il avait toujours été son modèle. Adrian s'enfonça de plus en plus dans une dépression sévère qui lui valut plusieurs overdoses mais, encore une fois, il survécut. Pourquoi était la question qui lui revenait toujours en tête. Pourquoi Dieu avait-il décidé de sauver un drogué plutôt qu'un brillant avocat ? Adrian pensait qu'il ne le méritait pas. C'est son frère qui aurait dû survivre, pas lui. Alors qu'il allait toucher le fond, il rencontra Ella. Une de ses clientes. Un ange. Cette jeune femme était complètement droguée mais, pourtant, très attachante. Par amour pour elle, il sortit peu à peu du trou dans lequel il s'était enfoncé. Ils avaient tous les deux un caractère de merde mais, au fond, ils se sont aimés dès le premier regard. Ensemble, ils sont même parvenus à combattre la drogue. Pourtant, tout n'a pas toujours été rose entre eux. Sous l'emprise de la drogue, Adrian pouvait être très violent. Du moins, tout le monde avait toujours pensé que c'était à cause de la drogue mais, en réalité, c'était bien plus complexe que ça. Bref, à maintes reprises, il avait levé la main sur Ella qui était toujours restée. Paumée comme lui, elle n'avait pas une haute estime d'elle-même. Leur désintoxication complète prit trois ans. Trois ans pendant lesquels ils devinrent fous amoureux l'un de l'autre. Même si les crises de violence d'Adrian étaient moins nombreuses, elles étaient pourtant toujours présentes ce qui ne freina pas Ella. En vérité, son amour l'aveuglait et elle était prête à tout accepter vu qu'elle savait qu'Adrian était fou d'elle. Pendant trois ans, ils restèrent ensemble pour le meilleur et pour le pire. Pendant trois ans, ils vécurent à fond cette relation d'amour-haine qui les détruisait mais qui, en même temps, leur faisait énormément de bien.

***

A l'âge de vingt et un an, Adrian décida de revenir à Irkoutsk, sa ville natale. Il y retrouva sa soeur âgée de treize ans. Elle avait bien grandi et, manifestement, était devenue terriblement intelligente. Lorsqu'elle revit son frère, elle lui sauta dans les bras. Elle qui avait vécu en internat était ravie de revoir venir un membre de sa famille. Dès son arrivée, elle l'attira dans une pièce fermée à clé pour lui expliquer ses découvertes. « Tu sais ... Cette nuit là. Tu as entendu comme moi ces gens parler de l'APO. Et bien, pendant ces années, j'ai fait quelques recherches et devine quoi. Ce sont des services secrets ! » Adrian la regarda bouche bée. Il ne pouvait en croire ses oreilles. Il l'aurait bien traitée de folle mais, en vérité, une part de lui savait qu'elle avait raison. Ils restèrent plusieurs minutes sans parler. Finalement, il se leva. « Je vais venger notre famille. Mais, je t'en prie, ne fais plus de recherches. Je n'ai pas envie qu'il t'arrive quelque chose. Reste en dehors de ça. » Une fois qu'il eut le dos tourné, Irina pouffa. S'il pensait vraiment qu'elle allait rester en dehors de cette histoire il se mettait le doigt dans l'oeil.

Quelques mois plus tard, il emménagea donc avec sa jeune soeur. Heureusement, elle savait se débrouiller ce qui faisait qu'il n'avait presque rien à faire. Etant donné qu'il ratait tous les plats qu'il entreprenait, elle avait fini par se charger de la nourriture. Lui, se chargeait de ramener de l'argent afin de couvrir sa soeur de cadeaux. Après tout, c'était la moindre des choses vu tout ce qu'elle faisait. Le jeune homme avait définitivement tiré un trait sur Ella. Il lui avait envoyé une lettre en lui expliquant qu'il en retournerait pas en France comme il le lui avait promis. Il ne lui donna aucun moyen de le joindre. Ce serait beaucoup plus facile comme ça. Afin de noyer son chagrin, il se mit à enchaîner les relations sans lendemain. Il ne voulait plus jamais souffrir autant qu'il souffrait en ce moment. La perte d'Ella avait été très dure à surmonter mais, grâce à la présence de sa petite soeur, il y était parvenu. Sa vie aurait pu être parfaitement normale et épanouie mais son problème de violence était toujours là, planqué au fond de lui. De temps à autre, il lui arrivait de piquer des colères sans raison. Une petite contrariété prenait chez lui une démesure parfaitement pathétique. Si sa soeur n'y prit pas attention au début, elle finit pourtant par s'y intéresser de près. Elle avait toujours été une fouineuse et elle le resterait probablement jusqu'à la fin de sa vie. Selon elle, les crises de violence de son frère apparaissaient lorsqu'il pensait de manière inconsciente à son frère. Inconsciemment, il se repassait la scène de son meurtre dans sa tête et s'en voulait de ne pas être intervenu. Explication plutôt vaseuse mais, dans le fond, elle était assez plausible. Sans s'en rendre compte, Adrian commençait à prendre quelques postures et quelques expressions chères à son défunt frère. Une part de lui essayait manifestement de continuer à le faire vivre à travers lui. Rapidement, ses crises devinrent plus violentes. Dans ces cas là, Irina avait pour consigne de s'enfermer dans sa chambre et de ne surtout pas aller le voir. Il fallait simplement attendre que ça passe. Adrian lui confia tout : ses doutes, ses peurs, ses angoisses. Irina est ainsi devenue sa confidente. Elle est la seule qui parvient à le calmer lorsqu'il est dans cet état. Adrian, de son côté, ne comprend absolument pas ce qui se passe. Il ne comprend pas pourquoi il se met dans une telle colère mais, en tous cas, il ferait n'importe quoi pour que ça s'arrête.

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A vingt-trois ans, une fois que sa soeur fut assez grande pour se débrouiller, il entreprit de mettre en oeuvre sa promesse. Il allait venger la mort de leur famille. Il allait venger Sebastian et, par la même occasion, leurs parents. Adrian n'était pas aussi stupide qu'il en avait l'air aussi élabora-t-il un plan assez complexe. Certes, avec l'aide de sa petite soeur, il y serait sûrement parvenu plus tôt mais il était hors de question qu'il la mêle à ces histoires. Ainsi, l'APO était une agence de renseignements ? Parfait ! Il allait en rejoindre une aussi afin de glaner des informations. Etant donné qu'il était russe, il était évident que son but était de rejoindre le SVR. Mais, comment s'y prendre ? Il se doutait bien qu'il ne pouvait pas arriver la bouche en coeur et demander une place d'agent. Non, il devait leur proposer quelque chose en échange, mais quoi ? La solution s'imposa naturellement à lui. Depuis qu'il était revenu en Russie, il avait continué ses trafics de drogue afin de nourrir sa petite soeur. Peu à peu, il s'était étendu à du trafic d'armes. Bien sûr, il n'aurait jamais pu y arriver seul. Au cours de ces années, il avait lié des contacts assez étroits avec la mafia russe. En gros, il travaillait pour elle et, en échange, recevait un pourcentage plus que correct sur ce qu'il vendait. Ce trafic était donc la clé pour entrer au SVR. Un jour, il prit son courage à deux mains et écrivit au SVR. Sa lettre, bien que très simple, résumait parfaitement son plan. Il décrivait ses liens exacts avec la mafia sans toutefois donner son nom. Il promettait, qu'en échange d'un poste bien payé, il ferait tout ce que le SVR lui demanderait. Il fallut quelques mois pour que sa demande soit traitée et, finalement, il reçut un jour une lettre lui disant que le SVR déclinait sa proposition. Pire, le SVR le menaça en le prévenant qu'à cause de son métier, il pourrait très bien être accusé de terrorisme.

A partir de là, il se reposa sur les épaules de la mafia pour se venger. Etant donné que le SVR refusait son aide, il allait tout simplement se passer d'elle. Il interrogea alors ses collègues de la mafia qui lui apprirent ce qu'il voulait savoir sur l'APO. Eux, n'aimaient pas non plus les agents secrets étant donné que ceux-ci nuisaient à leur travail. Adrian s'est alors rendu compte qu'il partageait le même but que ses "amis". Ils voulaient tous supprimer les agents secrets de la surface de la terre. Même si Adrian est très violent, cela ne l'empêche pas d'avoir quelques principes. En effet, il préfère tuer les agents de l'APO et du SVR étant donné que les autres ne lui ont rien fait. Bien entendu, si jamais la CIA ou le SIS commence à se mêler de ses affaires, là, il n'hésite pas à sortir un couteau pour trancher la gorge de ces agents. Au cours de ses voyages dans le moyen-orient, il a eu l'occasion de rencontrer quelques agents. Il en a tué plusieurs, tous de l'APO. Là-bas, il est une véritable super star, toutefois, personne n'a encore réussi à photographier son visage étant donné qu'il agit comme une ombre. Au SVR aussi il est très connu étant donné que cette agence essaie de combattre la mafia. Hypocrite. Pourquoi combat-elle la mafia alors, qu'en cachette, elle lui achète des armes ? Adrian n'y comprend pas grand chose mais, en tous cas, il sait qu'il ne peut compter que sur lui-même. Parallèlement, étant donné qu'il peut tuer et se défouler sur des agents, ses crises de violence se sont un peu calmées. Tout le monde est donc gagnant dans cette histoire.

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Sa vie avait donc repris son cours. Finalement, il avait trouvé une nouvelle routine qui lui plaisait beaucoup. Toutefois, sa petite soeur avait commencé à poser des questions sur les voyages incessants qu'il faisait. Même s'il n'avait pas voulu lui dire la vérité, il avait quand même été contraint d'en dire une petite part. Il lui avait ainsi avoué qu'il travaillait pour une organisation qui lui permettrait de venger leur famille. Malheureusement pour lui, sa soeur était devenue de plus en plus fouineuse et de plus en plus intelligente. Rapidement, elle comprit qu'il y avait quelque chose qu'il ne voulait pas lui dire. Toutefois, la seule erreur qu'elle fit, c'est de croire qu'il avait rejoint le SVR. Etant donné qu'elle voulait aider son frère, elle contacta le SVR en lui demandant un poste. La demoiselle s'était rendue au QG en personne. Elle n'avait jamais eu peur et, franchement, elle débordait de culot. Même si elle aurait pu avoir des ennuis, ils jugèrent que la gamine avec du potentiel. Puis, pourquoi refuseraient-ils une recrue aussi prometteuse ? Elle savait ce qu'elle voulait et se donnait les moyens pour réussir. Le SVR aimait ça. Sans en parler à son frère, elle fut donc engagée à l'âge de dix-huit ans. De toute manière, elle était majeure et vaccinée alors il n'aurait rien eu à dire.

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A l'âge de vingt-sept ans, Adrian pouvait se vanter d'avoir parcouru une bonne partie du monde. Toutefois, il y avait bien un pays où il rêvait de retourner : la France. Il n'avait eu aucune relation sérieuse depuis Ella et il devait bien avouer qu'elle lui manquait toujours. La blessure de leur rupture ne s'était jamais vraiment refermée. Heureusement, une mission l'y envoya. Après avoir tué un agent de l'APO, il alla frapper à la porte de leur ancien appartement. Bien entendu, personne n'avait vu Ella depuis des années. Mais, grâce aux petits bouts d'informations qu'il est parvenu à récolter, il a réussi à retrouver sa trace. Apparemment, elle avait plutôt bien réussi sa vie. Elle vivait dans une belle maison qui devait coûter un os. Adrian ne pouvait s'empêcher d'admirer la propriété tout en restant à l'extérieur. Alors qu'il allait partir, il vit un homme sortir de la maison. Probablement le mari d'Ella. Lorsqu'il la vit l'embrasser, son sang ne fit qu'un tour. Il attendit planqué dans sa voiture que cet homme disparaisse et, ensuite, vint retrouver sa belle. Les retrouvailles ne furent pas faciles. En effet, la jeune femme lui en voulait énormément d'être parti. Mais, bien vite, Adrian lui fit redécouvrir les frissons de leur relation passée. Sa petite vie était beaucoup trop rangée. Elle avait besoin d'un frisson que seul Adrian pourrait lui procurer. Il ne lui fallut que quelques heures pour retomber dans ses bras. Ils couchèrent ensemble. Tout était redevenu comme avant. Couchée à côté de lui, Ella finit par lui avouer qu'elle n'était pas mariée. Certes, elle était depuis un bon moment avec cet homme mais n'en était pas amoureuse pour autant. Adrian lui proposa alors de rentrer avec lui en Russie. Ella refusa. Même si elle n'aimait pas cet homme, elle avait choisi de vivre avec lui et devait assumer ses choix. Evidemment, c'est le moment que choisit le principal intéressé pour débarquer. Adrian régla rapidement cette histoire en tabassant ce type sans raison. Sa crise de colère avait repris lorsqu'il l'avait vu entrer dans la pièce. Il ordonna alors à Ella de rentrer avec elle. Sans trop savoir pourquoi, elle accepta. Au bout de quelques mois, ils emménagèrent ensemble.

« Pourquoi est-ce que tu dois encore partir ? Reste avec moi ! » Ella se contenta de rire et sortit du lit emportant la couette avec elle. « Tu peux parler. Tu voyages autant que moi je te signale » Il leva les yeux au ciel. Ce n'était pas faux. Pourquoi est-ce que les femmes de sa vie parvenaient toujours à retourner la situation ? Il se leva et la suivit à la salle de bain. « Allez. Dis que tu es malade. On pourrait rester à deux toute la journée comme ça » dit-il en lui mordant le cou. Elle le repoussa doucement. « J'aimerais bien mais c'est très important. C'est de ta faute si je suis venue en Russie alors que mon entreprise est en France. Tu dois donc accepter mes voyages incessants comme tu dis » Il haussa les épaules. Ella devait se rendre en France une fois par semaine ce qui avait le don de l'énerver. Etant donné que la jeune femme était déterminée, il n'insista pas et la laissa se préparer. Après lui avoir volé un baiser, elle sortit donc de l'appartement. Direction le quartier général de l'APO. Adrian sortit lui aussi de la maison. Direction le quartier général de la mafia. Aucun des deux ne connaissait le métier de l'autre et, heureusement, d'ailleurs. Dieu sait comment réagirait Adrian s'il découvrait que la femme qu'il aime travaille pour l'agence qui a tué ses parents et son frère ? Evidemment, la jeune femme n'est pas au courant de cette histoire. Pour l'instant, tout va donc pour le mieux. Enfin presque. Les crises de colère d'Adrian étaient toujours bel et bien présentes.

***

Tout son corps le faisait atrocement souffrir. Son sang bouillait à l'intérieur de ses veines. Chaque parcelle de sa peau était entrain de s'enflammer, envahie par la colère. Adrian rentra en trombe dans sa chambre et alla directement se regarder dans le miroir. Il avait l'air d'un fou. Il se prit la tête entre les mains passant plusieurs fois ses doigts dans ses cheveux tout en se demandant ce qu'il allait bien pouvoir faire. Finalement, il se rendit dans la salle de bain et ouvrit l'armoire qui renfermait les quelques médicaments qu'il possédait. Une boîte vint s'écraser dans l'évier. C'en était trop. Lorsqu'il était dans cet état, Adrian n'avait plus aucune patience et tout l'énervait. C'était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase. Aveuglé par la colère, il tapa violemment son poing contre le mur. Sans doute venait-il de se casser les phalanges pour la énième fois. Mais, même ce geste et cette douleur ne le calmèrent pas. Sa vue était entrain de se brouiller. Tant bien que mal, il passa sa main dans les boites de pilule en faisant ainsi tomber plus de la moitié. Finalement, il trouva ce qu'il cherchait. Des somnifères. Il en prit plusieurs d'un coup. C'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour se calmer lorsqu'il faisait de pareilles crises. Malheureusement pour elle, ce fut le moment que choisit sa petite amie pour rentrer dans la pièce. « Tout va bien ? » Même s'il l'aimait profondément, il ne parvenait pas à se contrôler lorsqu'il était comme ça. Malgré lui, des paroles brutales sortirent de sa bouche. « Vas-t'en » Malgré toutes les années passées à ses côtés, Adrian n'avait toujours pas réalisé que, quand il lui demandait de partir, elle s'obstinait encore plus à rester. Loin de l'écouter, elle s'avança près de lui et tenta de poser sa main sur son épaule. Il s'éloigna vivement tout en lui attrapant violemment le poignet et en la menaçant. « Je t'ai dit de dégager. Qu'est-ce que tu ne comprends pas ? » dit-il en la rejetant contre la porte. Apeurée et résignée, la jeune femme finit par quitter la pièce le laissant seul. Une seconde fois, il se regarda dans le miroir. Qu'est-ce qui clochait chez lui ?

Adrian se réveilla quelques heures plus tard. Même s'il était seulement 15h, il venait de dormir pendant plus de trois heures. Seulement trois heures. Vu tous les somnifères qu'il avait pris, il aurait quand même espéré dormir un peu plus longtemps. Lorsqu'il était dans cet état de rage, son corps semblait développer une force surhumaine. Avec ravissement, il se regarda dans le miroir. Tout était enfin rentré dans l'ordre. Le sourire aux lèvres, il passa un t-shirt et alla dans la cuisine. Ella était assise dans le canapé et sanglotait. Sans un mot, il s'assit à côté d'elle et passa un bras autour de son cou. « Je suis désolé ma chérie. Je ne voulais pas te faire peur ou te faire mal » Il savait qu'elle mourrait d'envie de lui faire la tête pendant une semaine, toutefois, elle se tourna vers lui en fronçant les sourcils. « Est-ce que tu as recommencé à te droguer ? » Il la regarda dans le blanc des yeux. La voir douter de lui lui faisait mal, cependant, il pouvait comprendre ses doutes. Il posa sa main sur la joue de sa petite amie et lui remit une mèche de cheveux derrière son oreille. « Non, je t'ai promis d'arrêter et je compte bien m'y tenir. Non, ce n'est pas ça » Il hésita. Etant donné qu'elle était assez rarement à la maison, elle ne savait pas que ces crises étaient de plus en plus fréquentes. Même si elle lui manquait lorsqu'elle partait en voyage, il était aussi très content qu'elle n'ait pas à supporter ça plus que nécessaire. Lorsqu'elle était là, il faisait un terrible effort sur lui pour se contrôler mais ce n'était pas évident. L'espace d'un instant, il faillit lui avouer son trouble psychologique mais, finalement, se ravisa. Sa petite soeur était la seule au courant et la seule qui pouvait vraiment le comprendre. Il lui sourit. « Je suis juste surmené au boulot mais tout va s'arranger. Allez viens embrasse moi tu en meurs d'envie » Même si elle était encore fâchée contre lui, elle ne put lui résister plus longtemps. Ella avait toujours été faible en sa présence.