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Who is like the Beast and who can wage war against it?
"Mama, you has got the keys?"

Misses Murdock ouvrit la porte de sa salle de bain et jeta un trousseau de clefs à son jeune fils qui sortit immédiatement de la maison pour aller ouvrir la voiture dans laquelle se trouvait son jouet préféré. C’était une autre époque, une époque à laquelle les choses étaient plus simples pour lui. Un jour charnière dans son histoire cependant, c’était celui où les hommes en uniforme étaient venus. Ils les avaient croisés alors qu’il revenait vers l’entrée une fois la voiture de nouveau fermée.

"Ma’am, can we come in?"

Le visage de sa mère, une icône qu’il garderait toute sa vie, était resté impassible lorsqu’elle lui avait calmement demander d’aller jouer dans sa chambre. Il ne s’était rendu compte de rien, on ne l’avait pas prévenu de ce qu’une telle visite pouvait augurer de mauvais à une famille vivant sur une base militaire. Aujourd’hui, il avait presque tout oublié de cette époque, tout sauf sans doute la vue de ces uniformes impeccables. Le souvenir était d’autant plus troublant qu’il n’arrivait plus à se souvenir du visage de son père, pas autrement que sur les photos qui avaient leur place sur chaque meuble…

Il y avait eu de moins en moins de photos avec le temps, de moins en moins de meubles pour tout dire. Une femme, noire qui plus est, avait du mal à trouver un emploi et lorsqu’elle en trouvait un, il n’était pas bien payer et ne lui apportait pas plus de considération que ça. Ils avaient rapidement quitté la base, et Damien pouvait encore se souvenir de la voix de sa mère lui répétant inlassablement : "They good people, they do what’s best for the troops but they can’t keep afloat forever." Pas question pour elle de se retourner contre ceux qui avaient, comme le dirait Bruce Springsteen, envoyé son père "tuer l’homme jaune".

Élevé par une veuve trop bonne pour un monde trop mauvais, Damien s’était très vite retrouvé à éviter l’école pour obtenir une éducation d’un tout autre genre. Celle qui lui permettait de travailler avant l’âge et d’avoir de l’argent sans pour autant obéir aux lois de ceux qui avaient abandonné sa famille. L’adolescence n’avait rien arrangé, bien entendu, et avant qu’il ait eu le temps de comprendre ce qui était juste ou non, il avait tué une première fois. Le système judiciaire américain lui était alors tombé dessus, mais jamais il n’avait perdu le soutien de sa mère qui souvent lui parler de rédemption, son discours alimenté par des citations bibliques dont le criminel n’avait que faire.

La prison avait été pour lui une épreuve traumatisante, mais instructive. C’était là qu’il avait appris à faire ses armes, à reconnaître les alliances et les allégeances. C’était le moment où il avait compris qu’il fallait être utile à quelqu’un pour survivre et qu’on n’obtenait jamais rien sans avoir sur l’autre une certaine emprise. En toute occasion, il fallait qu’une part de soit domine une part de l’autre, et ça passait aussi bien par le matériel que l’intangible. Le savoir était la clef, qu’il s’agisse de compétence ou d’information, il fallait avoir un point de vue plus avantageux que l’autre, une position haute.

C’était le caractère inspiré de cette philosophie qu’il revint dans les rues, mais plus pour être un coursier ou un simple gangster. Le meurtre qu’il avait commis lui avait permis d’intégrer un gang, certes, mais il s’ouvrit à de nouvelles ambitions et peu à peu fit son chemin au sein de la hiérarchie branlante du milieu pour finalement asseoir une position que beaucoup lui envieraient. Le trafique tomba sous son joug en quatre ans, un pouvoir sur lequel il veillerait avec la plus grande attention pendant deux ans avant de comprendre qu’il n’était pas bon d’être assis sur un trône prêt à sauter à tout moment. Il s’était finalement retiré dans les coulisses, désignant un homme de paille pour prendre sa place tandis qu’il se chargeait de "nettoyer" les différentes menaces issues de la rue tout en graissant la pâte à quelques ripoux. Il était las du business quand Malone l’avait abordé.

Depuis, il sert le drapeau, se demandant parfois si au final, plutôt que de chercher l’excitation d’une vie nouvelle, ce n’est pas la rédemption dont lui parler sa mère qu’il cherche.