Je déglutis en voyant ce si petit espace pour seul et unique passage. Malheureusement c'était le seul et unique moyen de continuer notre route. C'était mieux que rien en même temps. Soupirant, j'étais résigné. Il y avait des moments dans la vie où il fallait se lancer, et là s'en était un.

▬ Malheureusement vous avez raison. Pas le choix.

Regardant alors Alekzander passait en premier une certaine angoisse naquit dans ma poitrine, puis je grimaçais quand je vis que ce seul chemin s'affaissa légèrement sous son poids. Bon, il était passé. Je me consolais en me disait que j'étais plus légère que mon patron. Un, deux, trois ... C'était mon tour ! Faisant alors exactement les mêmes mouvements que Alekzander pour passer, je sentis sous mes pieds que ça s'effondrait encore un peu. J'espérais que ça tienne au moins jusqu'à que nous soyons tous passé. Je pensais à la jeune femme là.

Bref, avec une certaine habilité je réussis à franchir l'obstacle avec un grand soulagement. Pour passer, j'avais fait abstraction des bestioles si hideuses les unes que les autres. Je n'avais pensé qu'à réussir à franchir la pente. C'est tout. Encourageant ensuite d'un simple regard la jolie blonde pour qu'elle passe à son tour, elle fût tout aussi habile que nous et nous rejoignit après quelques minutes. Aucun n'était tombé cette fois-ci, grand merci, car je ne serais pas allé chercher le malchanceux comme la fois précédente.
Après cette petite activité à sensation, il ne nous restait plus qu'à continuer notre route en longeant un long couloir décorer de multiple peintures historiques. Malgré la beauté des lieux, je me refusais à prêter plus d'attention à ces dessins de peur d'être déconcentré et de tomber dans un piège. Je marchais donc avec une extrême attention. Je regardais où je posais les pieds et rien d'autre. Puis finalement en quelques minutes nous atteignîmes une nouvelle porte, tout aussi grande que la précédente. Je la soupçonnais de nous mener à une autre pièce. Regardant les deux autres, je finis par l'ouvrir moi-même, et j'en franchis le seuil découvrant la pièce suivante.

▬ On approche du but !

Une fois de l'autre côté, Alekzander souffla. Ca, c'était fait. Il n'avait pas spécialement peur des araignées, il suffisait de voir le nombre de fois, où, quand ils vivaient encore ensemble, Yuliana l'avait appelé en criant pour qu'il vienne l'aider si elle avait aperçu un de ces « monstres » à huit pattes. Mais là, il ne tenait pas particulièrement à tomber dans cette fosse où grouillaient divers insectes et animaux tous plus venimeux les uns que les autres.

Lily Joy fut la seconde à traverser, empruntant tout comme lui l'étroit passage contre le mur. Le tout avait été effectué dans un silence magistral, interrompu seulement parce quelques sifflements. S'il était quasiment impossible de se montrer totalement à l'aise dans ce genre « d'exercice », Alekzander remarqua que la jeune fille n'avait cependant pas de difficulté majeure lors de la traversée. Une simple demoiselle au pair aurait plutôt eu tendance à refuser catégoriquement de s'avancer, ou à se retrouver terrorisée, tremblante au beau milieu, non ? Il n'en savait trop rien, mais plus le temps passait dans ce temple, moins l'agent de la CIA avait de doutes quant à une autre identité de miss Spencer.

Après tout, elle était descendue avec une simple corde dans un trou profond d'une dizaine de mètres ; elle jouait soi-disant aux apprentis architectes dans un temple perdu du bout du monde ; elle était un peu trop sûre d'elle pour appartenir au « commun des mortels ». Une petite discussion s'imposait, c'était clair. Mais le moment était loin d'être propice, alors en attendant, elle restait toujours quelqu'un en qui il pouvait avoir confiance au point de lui laisser Kerian, quelqu'un de remarquable qu'il appréciait beaucoup. Bref.

Yuliana s'engagea à son tour, à vrai dire, Alekzander n'aurait su prédire de quelle façon elle aurait abordé cette fosse. La femme douce, amusante, sensible, câline et joueuse qu'il avait épousé aurait peut-être refusé de s'avancer au dessus d'araignées. Mais il savait également ô quelle force de caractère elle pouvait avoir ; c'était certainement aussi pour ça qu'il l'avait tant aimée. Même si parfois, aussi bornés l'un que l'autre, avec le même esprit de contradiction, ils avaient fait plus que des étincelles en se disputant. Cette femme-là aurait certainement laissé ses peurs de côté pour quelques minutes. Mais il y avait aussi l'espionne du SVR qu'il ne connaissait pas, et au final, ce côté laissait beaucoup d'ombre.

Mine de rien, l'idée que Yuliana puisse tomber l'inquiétait vraiment. Mais ce ne fut pas le cas, fort heureusement, et tous trois purent continuer.

Jusqu'à ce qu'ils se découvrent ce qui se présentait comme une troisième salle...

Yuliana stressait. Les araignées grouillaient dans ce trou à …. . Elle allait dire à rat mais ce n’était pas la bonne expression. Cependant, elle n’avait pas le temps de trouver la bonne expression. Elle devait passer. Elle devait passer pour qu’ils puissent se diriger tout droit vers la prochaine salle. Du moins s’ils ne tombaient pas de nouveau dans un trou, sur une fosse de bestioles ou elle ne savait quoi encore. Alekzander fut le premier à passer sur la petite marche qui leur offrait un sauf conduit de choix bien que très étroit. Evitant avec agilité les serpents passaient la tête hors de la fosse pour le mordre, il arriva sans peine ni blessure de l’autre côté. La russe poussa un soupir de soulagement. Elle ne voulait pas le voir disparaitre sous ces insectes avec la peur au ventre de ne pouvoir faire quelque chose pour le sauver. Elle ne se le permettrait pas mais une phobie ne se contrôlait pas surtout si l’on se trouvait devant ce … trou !

La brune passa en deuxième. Elle avait peur, ses gestes étaient moins assurés que ceux de l’agent de la CIA mais elle passa. C’était le plus important. Ils avaient réussi tous les deux sans se rétamer. Allez ma veille, s’ils l’ont fait tous les deux, tu peux le faire aussi. Elle regarda droit devant elle pour croiser celui d’Alekzander. Ne pas regarder en pas, se boucher les oreilles, ne pas les entendre grouiller, siffler … Ne regarder que le but, l’arrivée et non l’obstacle à franchir. C’était ce qu’on lui avait toujours appris. Ne pas se laisser distraire, rester concentrée. Alors elle resta concentrée après quelques secondes d’agitation. Les sifflements se firent plus discrets et bientôt elle ne pensa plus à rien d’autre qu’à cette marelle qu’il lui fallait traverser. Son regard s’accrochait à celui de son mari comme à une bouée. Elle était décidée. Elle ne flancherait pas, ne regarderait pas en bas. Sinon, elle était fichue. La traversée fut rude. Sa concentration fut mise à rude épreuve mais après quelques battements de cœurs loupés, elle y arriva.

« La prochaine fois, je prendrais ma bombonne de laque. Meilleure arme contre ces bestioles. », tenta t-elle de plaisanter une fois de l’autre côté. La russe resta quelques instants silencieuse, dans sa bulle, tentant de calmer son cœur qui battait la chamade. D’habitude, c’était le regard d’Alexzander qui la mettait dans cet état et sincèrement elle n’avait qu’une envie, qu’il chasse ses bestioles de sa tête d’un regard, comme avant. La vie était belle avant. Elle avait envie d’y revenir, de revenir trois ans en arrière lorsque tout allait bien.

Une fois calmée, la jeune femme suivit ses compagnons de missions en murmurant. « Voyons ce qui nous attend pour la prochaine. » Elle tentait de plaisanter pour se dire qu’elle allait bien, qu’elle avait récupéré de sa frayeur mais l’air de rien, elle n’en menait pas large.



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